Faire vivre des réussites à tous les élèves pour susciter leur motivation

2 juin 2025 08:25


Steve Bissonnette, professeur-chercheur à l’Université TÉLUQ, a présenté une conférence au sujet de l’enseignement explicite lors du congrès de l’ADFO. Cette approche structurée, soutenue par de nombreuses recherches, s’impose selon lui comme une stratégie essentielle pour répondre aux défis postpandémiques : baisse de motivation, troubles de l’estime de soi, diminution de la persévérance et hausse du nombre d’élèves en difficulté.

Dès le début de sa conférence, Steve Bissonnette a insisté sur l’idée que le rendement scolaire influence directement la motivation et l’estime de soi. « Contrairement à une croyance répandue, ce n’est pas le manque de motivation qui cause l’échec, mais bien l’inverse : c’est l’échec qui démotive. Ainsi, faire vivre des réussites aux élèves devient une priorité pour favoriser leur engagement et leur bien-être », fait-il valoir. 

Le lien entre réussite scolaire et persévérance est également documenté. « Les prédicteurs les plus robustes de la diplomation sont le rendement et l’absence de retard scolaire. Un élève qui vit des réussites, même s’il ne trouve pas l’école “amusante”, y restera. À l’inverse, un élève en échec répété sera plus susceptible de décrocher.» 

Pour le professeur, le succès est donc le moteur principal de la motivation, de la persévérance et de l’estime de soi.

« Ce n’est pas parce que les élèves ne sont pas motivés qu’ils ne réussissent pas, c’est parce qu’ils ne réussissent pas qu’ils ne sont pas motivés! Il faut donc influencer la réussite pour engendrer la motivation! »

L’effet enseignant et l’importance des pratiques efficaces

Sachant cela, comment faire vivre des « succès » aux élèves? 

Les chercheurs ont documenté au cours des décennies des pratiques comme étant plus efficaces que les autres. Parmi celle-ci, « l’enseignement explicite et l’enseignement réciproque sont deux stratégies qui favorisent les apprentissages fondamentaux (lire, écrire, compter) auprès des élèves en difficulté d’apprentissage et à risque d’échec ». Mais, encore plus intéressant, « on sait désormais que les pratiques efficaces qui conviennent aux élèves en difficulté bénéficient à l’ensemble des élèves », indique M. Bissonnette. Ce sont donc des pratiques à privilégier.

Par ailleurs, il rappelle que les recherches en enseignement démontrent aussi que l’effet enseignant est un facteur déterminant dans la réussite des élèves. Ainsi, pour éviter des disparités entre les classes, il recommande une planification concertée entre enseignants d’un même niveau dans une école : harmoniser les contenus, concevoir des évaluations communes et effectuer des corrections collectives. « L’objectif est d’assurer une équité dans les apprentissages pour tous les élèves. »

Exemples de gestes efficaces : 

  • Poser des questions ouvertes aux élèves : Cela permet de mieux saisir ce que les élèves comprennent et ne comprennent pas.
  • Ne pas utiliser les questionnements en grand groupe pour prendre les élèves en défaut : Même si c’est l’enseignant qui choisit à qui il pose des questions, cette pratique devrait servir à maintenir l’attention des élèves et non à prendre quelqu’un en défaut.
  • ​​Éviter de qualifier les tâches à réaliser de « facile » ou de « difficile » : Dans le premier cas, l’élève qui ne réussit pas se sentira dévalorisé et dans le second, l’élève en difficulté sera déjà convaincu qu’il ne réussira pas, avant même d’avoir essayé.

L’enseignement explicite : un modèle structuré

Au cœur de son propos se trouve l’enseignement explicite, une méthode en trois étapes : le modelage, la pratique guidée et la pratique autonome. Le modelage par l’enseignant consiste à rendre visibles les raisonnements implicites en expliquant clairement aux élèves quoi faire, pourquoi, quand et comment. Ensuite, la pratique guidée permet aux apprenants de s’exercer avec un accompagnement étroit, alors que la pratique autonome les amène à réinvestir seuls leurs apprentissages.

Source : Extrait du support de présentation.

Selon Steve Bissonnette, la pratique guidée est la pierre angulaire de cette approche. Elle permet de valider la compréhension et d’apporter une rétroaction immédiate. Si les élèves ne comprennent pas, on retourne à l’étape du modelage. Contrairement à l’enseignement traditionnel, l’enseignement explicite s’ajuste au niveau de compétence de l’élève et au degré de nouveauté ou de complexité de la tâche.

Intervenir aussi sur les comportements

D’ailleurs, le chercheur rappelle que l’apprentissage et le comportement sont intimement liés et que l’enseignement explicite s’applique également aux comportements. Ainsi, il propose une gestion préventive des comportements où les enseignants sont invités à nommer clairement leurs attentes, à instaurer des routines et à modeler les comportements attendus. « Les élèves ont besoin prévisibilité. »

Pour les interventions curatives, il suggère de documenter les écarts de conduite majeurs et d’établir des arbres décisionnels clairs en équipe-école. « Lorsqu’un élève adopte un écart de conduite majeur, celui-ci devrait être retiré temporairement de l’endroit où il se trouve, car son comportement perturbe le bon déroulement de l’activité », dit-il.

Il recommande la création d’un comité comportement, qui établit une distinction entre les écarts mineurs et majeurs, et qui élabore une trousse d’intervention à disposition du personnel afin d’harmoniser les réponses à l’intérieur d’un établissement. Des outils comme le baromètre comportemental permettent également de suivre les tendances et d’orienter les actions au sein de l’école.


À retenir

  • Le succès précède la motivation : faire vivre des réussites aux élèves est un levier puissant pour les motiver et renforcer leur estime d’eux-mêmes.
  • L’enseignement explicite repose sur un enchaînement clair : modelage, pratique dirigée, pratique autonome, avec rétroaction continue.
  • La pratique dirigée est centrale : elle permet de vérifier la compréhension et d’ajuster l’enseignement en temps réel.
  • La réussite passe aussi par des comportements positifs : un climat scolaire prévisible et sécurisant favorise l’apprentissage.
  • Les enseignants font une réelle différence : en adoptant des pratiques fondées sur des données probantes, ils contribuent directement à la persévérance scolaire.

La conférence de Steve Bissonnette était présentée dans le cadre du colloque 2025 de l’ADFO, l’Association des directions et directions adjointes des écoles franco-ontariennes. Organisé sous le thème « Inspirer, influencer, mobiliser », il a rassemblé quelque 350 leaders du réseau scolaire francophone de l’Ontario autour d’une programmation riche en échanges et en réflexions.


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