La politesse, ça s’apprend à la maison !

19 mai 2025 13:30

Ah, cette sacro-sainte politesse !

Pourquoi est-ce que les adultes (professionnel-le, parent ou autre) y tiennent autant ? Qu’est-ce qu’elle vient titiller chez chacun-e d’entre nous : reconnaissance, respect, réflexes, habitudes, éducation… ?

La politesse est un ensemble de normes sociales partagées qui se traduisent par une communication ritualisée tant verbale que non-verbale et qui tendent à favoriser le vivre-ensemble. Par exemple, lorsque quelqu’un-e nous bouscule, nous nous attendons à recevoir des excuses, exprimées avec une formule connue : « Désolé-e » ou encore « Veuillez m’excuser »... Ces différentes variantes ont pour fonction de nous rassurer sur le caractère involontaire de l’acte.

Après les avoir entendues, nous réalisons que cet acte n’était pas destiné à nous agresser. Certaines actions deviennent, alors, plus compréhensibles et, surtout, plus acceptables. Elle est donc importante, car elle apporte de la lisibilité dans un monde social incertain.

L’usage des formes de politesse renforce une certaine confiance dans nos relations. Dire « bonjour » signifie à l’autre qu’on l’a vu-e, qu’on la-le prend en compte en tant que personne. L’inverse signifierait qu’il-elle n’a pas été remarqué-e ou qu’il-elle est ignoré-e, qu’elle-il n’est pas pleinement un individu.

De même, le « merci » est une manière d’exprimer qu’une attention, un don ou un service n’est pas passé inaperçu, qu’un effort a été fourni et que l’on en est reconnaissant-e. Ces formules englobent des idées et des sentiments complexes en peu de mots. Ainsi, elles permettent la compréhension des intentions des un-e-s et des autres et favorisent des attitudes positives entre les personnes.

L’école, en tant que société miniature, exige, à raison, que la politesse s’applique en son sein puisqu’elle est nécessaire aux relations entre humain-e-s. Et on pourrait s’arrêter ici. Pourtant...

La politesse évolue dans le temps et en fonction des lieux, des groupes sociaux, des générations. Tout comme la langue, elle est fluctuante. Par exemple, tenir la porte à une femme était considéré il y a peu comme le pinacle de l’élégance. Aujourd’hui, beaucoup considèrent ce geste comme offensant.

Par conséquent, parce qu’elle est ancrée dans la société, l’école (et ses acteur-trice-s) est obligée de tenir compte de cette évolution et d’ajuster sa posture et ses attentes.

« La politesse, ça s’apprend à la maison ! »

En tant que composante de la communication, la politesse est une compétence. Et comme toute compétence, elle s’acquiert, s’exerce, se développe. On ne naît pas poli, on apprend à l’être.

C’est au travers du processus de socialisation que les enfants comprennent quel comportement est attendu, ce qui est grave ou insignifiant. Ils-elles doivent tester les normes et les règles, les transgresser régulièrement pour en éprouver la cohérence et en comprendre le sens et les limites.

Par conséquent, à l’école, exiger simplement qu’un enfant soit poli est un peu naïf. C’est comme si un-e professeur-e de sport se contentait de dire : « C’est inacceptable que tu ne saches pas nager ! ».

L’école s’occupe de connaissances, de compétences, d’apprentissages déterminés, mais aussi d’autres, plus implicites, comportementaux et sociaux. Si l’école l’oublie ou le relègue à la sphère familiale, elle s’exclut du monde réel et crée un espace discriminant dès la 1re rentrée des enfants.

En effet, toutes les familles sont différentes. Elles parlent différemment, n’ont pas les mêmes valeurs, la même histoire. Il y a des familles où le langage tient une place importante, d’autres pas. Il y a des familles où le système scolaire est critiqué, regardé avec méfiance, d’autres où il est valorisé.


Alors si l’école abandonne entièrement l’acquisition des normes sociales aux univers familiaux, nous parviendrons difficilement à vivre en collectivité.

Or, comme l’affirme le décret Missions, le but de l’institution scolaire est de former des citoyen-ne-s bien dans leur peau, capables d’agir dans et pour la société. L’école étant (presque) le seul lieu collectif que nous fréquentons tou-te-s, elle doit assumer son rôle et participer activement à la construction d’une société la plus équitable possible où chacun-e, sans distinction, est pris-e en compte et accompagné-e dans son cheminement.

« Pour nous empêcher, nous, les adultes, de trop vite cataloguer des enfants moins rôdé-e-s à la politesse comme étant "irrespectueux-ses", "mal-élevé-e-s" ou encore "arrogant-e-s" et d’avoir des paroles ou des actions méprisantes, dures ou punitives, l’école doit être patiente. »

Elle doit offrir du temps et des possibilités à tou-te-s d’acquérir la maîtrise de la politesse, dans tous les moments du quotidien. Elle doit soutenir les comportements adaptés, sans stigmatiser ceux qui le sont moins. Sinon, elle intensifie les inégalités déjà existantes ou en crée de nouvelles. Elle nuit également au bien-être des enfants, à la construction de leur confiance en elles-eux et à leurs apprentissages. Bref, elle passe à côté de sa mission !

Enfin, la politesse, mal comprise, conduit à entretenir certains rapports de domination : elle ne se décrète pas selon le statut social, l’âge ou les circonstances. Si les jeunes se doivent d’être poli-e-s envers les personnes plus âgées, c’est que leur statut est considéré comme inférieur.

Un-e élève impoli-e envers un-e instituteur-trice sera sanctionné-e, mais quelles conséquences si c’est l’inverse ? À l’école, la politesse peut se voir comme une manifestation de la hiérarchie scolaire qui fait comprendre, dès le plus jeune âge, que chacun-e a une place et que ces places ne se valent pas.

Or la politesse que nous attendons des enfants doit être aussi celle que nous leur rendons. Autrement dit, qu’être poli-e soit une attitude générale, une composante du rapport aux autres, peu importe les différences entre les individus. C’est comme ça que les normes sociales s’apprennent : par imitation.

Le rôle des adultes est primordial dans ce processus. Ce sont elles-eux qui, au départ, font vivre les règles et rappellent ce qui est souhaitable. Mais c’est aussi leurs attitudes et leurs paroles qui guident les enfants dans cet apprentissage, tout en servant d’exemple.

Comme toujours dans les affaires humaines, rien n’est simple ou naturel. Tout est lié au contexte et à l’entraînement. Et quel beau terrain que l’école ! Celle-ci doit poser un cadre où l’exercice de la politesse est possible et valorisé, à condition que cette dernière soit considérée comme des habitudes de sollicitude des un-e-s envers les autres pour créer un climat scolaire serein.

1. Consultable sur https://www.gallilex.cfwb.be/document/pdf/21557_052.pdf


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