De nombreux enseignants et éducateurs me confient être phagocytés par les tensions vécues par certains élèves qui se confient lourdement à eux, et dont les souffrances leur reste en tête et dans les tripes après l’école …

Jouer le rôle d’une éponge des ressentis difficiles des jeunes est parfois contreproductif si tu souhaites les aider, les accompagner à traverser certains moments douloureux.

Pour éviter d’être trop pompé(e) par le stress des élèves, de dramatiser leur vécu et d’ainsi cristalliser leur souffrance, il y a 5 questions à te poser. Ces questions constituent la trousse de secours du sauveur et permettent de sortir du rôle de sauveur, qui n’aide pas vraiment le jeune, mais plonge et le fait plonger encore davantage dans son mal-être :

1)      L’autre t’a-t-il demandé ton aide ?

2)      As-tu l’envie, le temps, l’énergie de l’aider ?

3)      Est-ce ton rôle, ton mandat de l’aider sur ce point ?

4)      As-tu les compétences pour l’aider ?

5)      L’autre fait-il sa part ou est-ce que tu fais tout pour lui : 50/50 ?

Si tu réponds NON à une seule de ces questions, courage fuis ! Car tu es dans la position du sauveur sacrificiel !

Prenons un exemple concret raconté par une éducatrice, que nous appellerons Anne. Anne voit une élève (appelons-la Manon) soupirer à l’étude et dire : « Pfffffff, j’arrive à rien ! J’suis vraiment trop nulle ! » Harponnée par la plainte de Manon, Anne s’empresse de lui proposer son aide, que ce soit pour le travail scolaire (Anne passe beaucoup de temps à aider Manon à faire ses devoirs à l’étude) ou pour trouver des solutions à ses problèmes avec les autres élèves (Manon se plaint d’être rejetée ou mal aimée). Ce faisant, Anne est moins présente pour surveiller la récréation, l’étude et s’occuper des autres élèves. Cette situation épuise Anne, qui en même temps se sent super mal de laisser Manon dans ses difficultés.

Anne se donne-t-elle la mission de sauver Manon ? Afin d’analyser la situation, reprenons les questions de la trousse de secours du sauveur :

1. Manon demande-t-elle explicitement à Anne son aide ? NON, elle se plaint ou soupire.
2. Anne a-t-elle l’élan de l’aider comme elle le fait ? OUI et NON, l’aider comme ça et à ce point l’épuise et l’empêche de s’occuper des autres élèves.
   
3. Est-ce son rôle ? NON, ce n’est pas son job de faire ses devoirs avec elle et de régler ses problèmes relationnels.
   
4. En a-t-elle les compétences ? OUI, en partie, car Anne est très à l’écoute et créative en termes de recherche de solutions. NON concernant les devoirs, qui lui demandent de se replonger dans des matières qu’elle ne maîtrise pas (ou plus), explique-t-elle.
   
5. Manon fait-elle sa part de façon suffisamment autonome ? NON, elle laisse Anne trouver des réponses aux questions dans les devoirs et lui demande aide et conseil (en se plaignant) à la moindre difficulté.
   

Comment dès lors sortir de la position de sauveuse dans laquelle Anne s’est engluée malgré elle ? Voici quelques pistes qu’Anne a testées :

• Vérifier que Manon appelle à l’aide et lui demander d’expliciter ce que Manon attend d’Anne : « Qu’est-ce que tu attends de moi, quand tu me dis ça en soupirant ? » Anne a aussi arrêté de réagir à chaque soupir en demandant : « Qu’est-ce qui ne va pas ? »
  
• Refuser de décider à la place de Manon : « Je veux bien t’écouter, mais je peux pas te dire quoi faire. C’est à toi de décider … »
  
• Choisir jusqu’où et comment Anne est OK d’aider Manon et la responsabiliser : « Je peux t’écouter après l’étude, mais là je suis occupée avec tout le groupe. Sinon, je veux bien te présenter Madame Fallon, la coach scolaire, qui pourra t’aider pour tes difficultés scolaires. Et y a aussi le CPMS avec lequel je peux te mettre en contact pour que tu puisses te confier sur ce qui va pas. Et si jamais tu te sens harcelée, y a toujours la cellule harcèlement de l’école : tu peux parler avec Monsieur Firmin et il te dira ce qui est possible. Mais bien sûr quand je ne suis pas occupée à la récré ou à l’étude, tu peux toujours venir me raconter comment ça se passe pour toi. En parler quelques minutes, c’est possible. Mais plus que ça, ça m’empêche de rester dispo pour les autres élèves. »

C’est précisément ce qu’Anne a fait avec Manon. Sur ce, Manon s’est autonomisée et a trouvé du soutien ailleurs, auprès de personnes qualifiées et mandatées pour l’accompagner. Ce qui a considérablement soulagé Anne au quotidien …

Tu veux te former à la gestion des tensions à l’école (et dans le privé aussi !) et recevoir ton Certificat en Gestion des Tensions au Travail ? Clique ici pour voir les infos sur le Certificat 2022 : https://www.centre-sweetch.com/activites/agenda/certificat-en-gestion-des-tensions-au-travail/

Christelle Lacour